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Thérapie génique : késako ?

La thérapie génique on en entend souvent parler, de plus en plus souvent mais de quoi parle-ton au juste ? Nous allons essayer de rendre cette science qui peut paraître compliquée un peu plus compréhensible.

N'hésitez pas à nous poser vos questions !


Istock/ metamorworks


La thérapie génique, c’est principalement pour des maladies génétiques :

Les maladies génétiques sont dues à des mutations dans un gène qui se transmettent d’une génération à la suivante, ou bien à des mutations acquises au cours de l’existence susceptibles d’induire le développement d’un cancer.

Les gènes sont porteurs d’information et bien protégés au cœur de la cellule, dans le noyau (fig1).


figure 1 Du gène à l'ADN et au chromosome dans la structure cellulaire.(Istock/ ttsz)


De plus, l’information est la même dans toutes les cellules, mais toutes les cellules ne l’utilisent pas de la même manière ni au même moment. De ce fait, les approches de thérapie dite « génique » ne ressemblent à aucune autre sorte d’approche thérapeutique : il s’agit d’aller corriger une information dans l’espoir que la correction améliore une fonction.

Les trois domaines principaux dans lesquels des essais cliniques sont menés sont les maladies monogéniques, le cancer et certaines maladies dégénératives comme la maladie de Parkinson ou l’insuffisance cardiaque.


Principes de thérapie génique

Du fait de cette connaissance de la génétique et des gènes responsables de certaines maladies, les chercheurs ont imaginé corriger directement les gènes « malades » ou dysfonctionnels. C’est le pourquoi du génie génétique et de la thérapie génique.

Le développement de la thérapie génique est axé sur deux grands principes :

· L’introduction de gènes assurant des fonctions perdues ou manquantes. C’est le cas de l’hémophilie A, due à l’absence d’un facteur de coagulation par suite de perte de fonction génique : la thérapie génique apporte le gène du facteur VIII et permet au sang de coaguler « normalement ».

· Le blocage de gènes produisant des effets non voulus. Un exemple est l’utilisation de petits ARN antisens.


Pour ce faire, deux stratégies ont été développées (fig 2) :

  • La thérapie « ex vivo ». Cette approche est la plus aboutie, car c’est la plus « simple » à mettre en œuvre. Il s’agit de prélever des cellules au patient, de modifier leur patrimoine génétique en culture, puis de les auto-greffer afin qu’elles colonisent l’organe ou le tissu malade. Cette stratégie est utilisée avec succès pour traiter les maladies du sang (hémophilie, drépanocytose, thalassémies…). En effet, le sang est un tissu à renouvellement rapide entièrement issu de cellules souches localisées dans la moelle osseuse : une greffe de moelle permet de renouveler entièrement le tissu sanguin à partir des cellules souches modifiées.

  • La thérapie « in vivo ». Dans ce cas, le remplacement du tissu entier n’est pas possible, et il s’agit d’aller traiter les cellules au cœur de l’organisme en leur apportant le gène thérapeutique. Cette stratégie est actuellement limitée par l’étendue des zones que l’on veut traiter, car on ne sait pas encore comment atteindre l’ensemble des cellules de l’organisme.



Fig 2 : Les deux stratégies de la thérapie génique (« in La Génétique pour les Nuls, Dr Patrice Bourgeois, Dr Tara Rodden, illustration de Fabrice Del Rio Ruiz © Éditions First, 2021 )


Focus sur l’approche par ARN

Dans cette approche, il s’agit d’essayer de bloquer l’action du gène défectueux au cœur des cellules. Ce n’est pas vraiment de la thérapie génique, mais plutôt de la thérapie ciblée génétiquement, sans modifier l’ADN. Pour cela, on essaie par exemple de détruire un intermédiaire produit par le gène en question, par des approches appelées « ARN antisens ». Dans l’amylose héréditaire par exemple, une protéine anormale est produite à cause de la mutation d’un gène. En injectant un ARN antisens capable de détruire le message anormal, les patients ont eu une amélioration notable de leurs symptômes neurologiques. Ils ont toujours la mutation de leur ADN, mais l’effet de cette mutation est empêché.

Dans cette catégorie se place aussi la thérapie par saut d’exon, qui fera l’objet d’un prochain billet.


Thérapie génique proprement dite

Pour apporter une copie normale du gène dans les cellules afin de restaurer l’action du gène défectueux, on doit utiliser un vecteur – en général, un virus inactivé. Une autre approche plus récente consiste à corriger l’anomalie directement sur le gène défectueux de manière à ce qu’il redevienne normal, c’est la technologie CRISPR-Cas9 (qui a fait l’objet d’un prix Nobel)

Parmi ces approches de thérapie génique, seule celle utilisant des vecteurs a abouti à des médicaments autorisés pour le moment. Un exemple de vecteur autorisé à la vente depuis fin 2017 aux USA est le Luxturna : il traite la dystrophie rétinienne liée à des mutations du gène RPE65.


De grands espoirs malgré quelques problèmes.

Pour le moment, on ne sait pas cibler le corps entier. La durée du traitement demeure également une inconnue. Le coût de toutes ces approches est élevé, et la production industrielle de vecteurs à grande échelle n’est pas encore suffisante. Les réactions à long terme de l’organisme face aux virus inactivés ne sont pas à ce jour entièrement connues, mais il est probable qu’ils déclenchent une réponse immunitaire. Enfin, à ce jour, on ne peut traiter que les maladies dues à des mutations dans un seul gène à la fois (maladies monogéniques).

De nombreux essais sont en cours comme le montre l’iconographie suivante



Par Patrice Bourgeois

ingénieur en chef en génétique au CHU Timone à Marseille, où il participe au diagnostic des maladies rares. Il enseigne la biologie, la génétique et l’embryologie dans la région de Marseille. Il est coauteur de La Bioéthique pour les Nuls en 50 notions clé chez First.

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